dimanche 21 août 2011

The Future (Miranda July - 2011)

The Future
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Écrit et réalisé par Minada July

The Future raconte l’histoire d’un couple de 35 ans qui a un mois pour s’inventer une vie, avant que n’arrive pour perturber les deux membres un chat ramassé sur la route. Ce mois d’attente, c’est le mois pendant lequel la SPA de Los Angeles garde le chat sous contrôle.
  
Le film se découpe clairement en trois actes ainsi qu’un prologue et un épilogue racontés par ‘le chat’ en voix off. On ne voit pas le temps passer. Le premier acte est certes un peu lourd, la réalisatrice ayant eu des difficultés à mettre en place l’histoire des personnages. Ces apparaissent comme deux loosers, l’un travaillant pour un centre d’appel informatique alors qu’il voudrait devenir grand chef d’état et l’autre souhaitant devenir grande danseuse mais donnant des cours dans un cadre somme toute ridicule comparé à ses ambitions.

Difficulté aussi à mettre le thème de son histoire en place : la proposition qu’offre le futur. Les deux personnages ont un temps limité pour modifier leur futur avant que le chat ne s’insère dans leur vie, et ils vont devoir jouer (bluffer) ce temps, ce futur qui n’est pas encore arrivé et pourtant déjà là.

Ceci mis en place, ce film est un délice. Chacun de leur côtés, ils vont chercher à vivre ce qu’ils ne pourront plus faire ensuite, et tous deux rencontreront un homme âgé. Sophie rencontre Marshall, la figure âgée du père protecteur mais veuf, avec sa jeune fille, Gabriella. Jason, son petit ami, rencontre pour sa part Joe, un papy veuf, lui aussi, et reflétant la générosité même… tant pour sa femme que pour ce démarcheur (Jason démarche pour lutter contre le réchauffement climatique, un rêve de gosse).

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Au début du film, bien qu'ensemble, Jason et Sophie vivent séparés...

Là-dessus, les deux protagonistes se perdent dans leur voie, Sophie devenant petit à petit l’amante de Marshall et la mère de Gabriella, quand Jason devenant pour sa part le fils de Joe. Mais comme tant Sophie que Jason s’aiment mutuellement, Sophie avoue à Jason qu’elle le trompe. Ou du moins, elle n’en a pas le temps, car Jason arrête le temps (comme le jeu auquel ils jouent, arrêter le temps, à la première séquence, se figeant sur place). Dès lors ce met en place une urgence : d’un côté, Sophie imagine (ou vit) une vie avec Marshall et Gabriella, et de l’autre, Jason ne veut pas que Sophie s’échappe. Seulement, et c’est là que la poésie s’insère réellement dans le récit alors qu’elle n’était auparavant que superficielle, le temps n’est pas réellement arrêté, et continue de passer quand dans sa bulle, Jason, lui, le voit stoppé. Au final, tant Sophie que Jason passeront voir le chat trop tard, et ce dernier aura décédé.

Puis, c’est la réconciliation, en mi-teinte, filmé en retrait, ne proposant justement pas de réelles retrouvailles, mais disséminant des indices sur ce qu’il peut se passer ensuite.

On a la joie de voir que nous ne sommes pas dans un film manichéen, comme le sont la majorité des films américains, et où tout est apporté avec finesse.

Miranda July est, parallèlement à son début de carrière de cinéaste (elle a été primée avec Moi, toi et tous les autres, son précédent et premier film, en 2005) une artiste américaines, travaillant sur tous les supports (sculpture, danse, vidéo, scène…). On retrouve ici une sensualité tendre. La couleur jaune est symbolique : elle enveloppe d’abord les jeunes enfants auxquels elle apprend à danser, comme un jeu. Elle retrouve plus tard un T-shirt qui s’avance (littéralement) sur le sol de la route et vient la rejoindre un soir. Depuis 15 ans, son professeur de dance attendait que Sophie fasse une grande œuvre, et là, en s’enveloppant dans ce vêtement jaune, elle se met à aboutir une création sensuelle… magistrale. On reconnait au moins une influence (Lamentation de Martha Graham) reprenant le principe du ‘tube’ qui représente l’obsession qu’à le corps à vouloir s’y enfouir ou s’en sortir.

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Ultime chorégraphie... le corps de Sophie parle pour elle...

Pour résumer, après un début laborieux, le film se goûte comme une sucrerie, une goute de fraicheur en cet été chaud… pour finir, voici le trailer :

mercredi 3 août 2011

Super 8

Super 8


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Super 8 est l’histoire d’un garçon qui pour faire le deuil de sa mère doit renvoyer un extra-terrestre dans l’espace.
En tournant un film de zombie en super 8, un groupe de collégiens voit une voiture entrer volontairement une collision avec un train. Ce train transportait diverses chose top-secrètes, et à partir de là, les ennuis commencent.

Ce film écrit et réalisé par J. J. Abrams est un très bon divertissement. Ceux qui n’ont apprécié ni les séries Alias et Lost, dont il est le créateur, ni Mission Impossible 3 ou Armageddon, dont il fait partie du pool de scénaristes, auraient pu attendre pire. Ce film étant plus un hommage à ceux de la décennie 80 réalisés par Steven Spielberg, nous sommes dans un tout autre territoire, un tout autre univers que ceux susmentionnés. De fait, ce film aurait pu s’appeler « quand le monstre de Cloverfield rencontre Elliot, héros d’E.T. l’extraterrestre ».

Je ne vais pas tergiverser plus longtemps sur des points de vues personnels, sinon que comme beaucoup de spectateurs, je regrette la fin, à partir du moment où les personnages principaux vont chercher la fille (action qui fait par ailleurs curieusement penser à la fin de Cloverfield). Dès ce moment, on passe d’un film nostalgique à un film d’action, plutôt musclé, avec des révélations qui arrivent après une repentance exprimée dans le dernier dialogue précédant – l’évolution des différents personnages est trop rapide (même pour le méchant militaire).

Je vais axer mon étude sur le lien entretenu entre l’extraterrestre et l’homme sur le sol terrien dans les films américains. Tout d’abord, un bref historique, qui débute après la première apparition officielle de soucoupes volantes, en 1947 : 

Comme s’il avait fallu 4 ans pour que l’information sorte sur les écrans de cinéma américains, ce dernier s’est emballé sur le sujet à partir de 1951. L’un d’eux s’appelle Le Jour où la terre s’arrêta (The Day When the Earth Stood Still, même année) et fut réalisé par Robert Wise. Ce film présente un extra terrestre, Klaatu, et tient un propos optimiste sur les rapports entretenus entre ce dernier et les humains. Hormis cette fiction, les Extraterrestres se mettent à envahir le monde (représenté, bien évidemment, par l’Amérique) : La chose d’un autre monde (1951), Zombie of the Stratosphère (1952) mais surtout Les envahisseurs de la planète rouge (Inviders from Mars), Phantoms from Space, la chose d’un autre monde (It Came from Outer Space), La guerre des mondes (The War of The World première version, réalisée par Byron Hasking), tous de 1953. L’emballement cinématographique continue jusqu’à présent, avec quelques exceptions (2001, l’odyssée de l’espace ; 2001, a Space Odysee, Stanley Kubrick, 1968, par exemple).

Le mur de Berlin chuta en 1989, et dans l’année qui suivit, le communisme décéda. La ligne idéologique des films changea alors, avec Mars Attacks (1996),  Men In Black (1997)… la preuve la plus claire est le discours du président américain dans Independance Day (1998), qui aurait pu passer dix ans avant, mais qui fait ici propagande[1].

Puis, un évènement non négligeable se produit : les deux plus hautes tours du World Trade Center sont détruites le 11 septembre 2001, toutes deux perforées par un avion. L’asseau avait aussi visé le pentagone (ou la maison blanche selon d’autres versions). Presque 10 ans après, les extraterrestres reviennent (ils ne nous avaient jamais vraiment quittés, puisqu’il y eut entre 2002 et 2008 Men in Black 2 (2002) et MIB 3 (2007), Alien Versus Predator (2004) parmi les films les plus commerciaux) Cependant, le dernier film cité, croisement des deux franchises que sont Alien et Prédator, propose quelque chose que l’on n’avait jamais vu avant : les deux espèces extraterrestres se déchirent sur terre, sans prêter une réelle attention aux humains qui se trouvent entre eux. Puis suivirent les films Cloverfield  (2008) District 9 (2009), puis désormais Super 8 (2011). Je n’ai pas cité Paul (Greg Mottola, 2011) car je ne l’ai pas vu ; je m’en tiendrais cependant aux différentes critiques que j’ai pu en lire.

D’un point de vue idéologique, pour faire simple, hormis les quelques exceptions du type Le jour où la terre s’arrêta, 2001 : L’odyssée de l’espace, E.T. l’extraterrestre, etc. et jusqu’à la chute du mur de Berlin, l’extraterrestre représente idéologiquement ce que l’américain déteste. En l’occurrence, le Russe. Afin d’appuyer cette symbolique, l’extraterrestre est souvent seul. Puis, après cette chute (et grâce aux progrès de l’informatique et de la 3D) au lieu d’y avoir un ET, il y en eu plein. Les humains ne se chargeant plus que de gérer cet afflux de population. Même s’ils restent moins beaux que les hommes certains de ces derniers restent abordables, dotés de projets louables, comme éliminer les vilains (voir Frank, l’extra-canin de MIB II). Souvent, dans ces derniers films, les humains ne sont présents que parce que les E.T. règlent leurs problèmes sur terre. Après tout, pour deux groupes d’ET qui mesurent 10 mètres de hauts, les humains, de haut de leur deux mètres, ne sont que de maigre importance (je pense ici aux Autobot et Decepticon, extraterrestres issus de la franchise Transformers). Enfin, AVP, Cloverfield, District 9, Super 8 proposent des extra-terrestres d’un nouveau point de vue. Leur rapport aux humains est plus ténu : il échappe même aux protagonistes. Certes, il ce rapport joue un rôle direct vis-à-vis des personnages principaux (détruire New York, régler un différent en y faisant participer malgré eux des humains, être des réfugiés à libérer) mais à la base, ils sont bons. Ils obéissent donc dans ces films à une nouvelle idéologie. Désormais, tant District 9 que Super 8 (ou même Paul) ces films travaillent sur la théorie du complot. Les héros ne comprennent pas parfaitement les tenants et les aboutissants de leur action.

L’idée de Super 8 est donc de faire de l’extraterrestre, initialement méchant, un gentil-extraterrestre-devenu-méchant-à-cause-du-traitement-inhumain-que-lui-ont-fournis-les-humains-pendant-13-ans. De travailler avec un extraterrestre qui a tant de problèmes le ramène à des choses humaines, des rapports humains. Et comme ce sont ses derniers qui sont la cause, la morale reste sauve. Après tout, la morale est aussi bon enfant que celle du film Avatar de James Cameron, se situant sur la planète Pandora. Finalement, plus que le 11 septembre 2001, c’est la présidence de Bush qui a marqué les esprits. On peut supposer que sa loi sur le Patriot Act ait débouché sur cette multiplication de théories du complot (tant dans les films d’Extraterrestres que dans d’autres genres). Les hommes de pouvoirs sont devenus les méchants.

Désormais, observons les visuels des extraterrestres qui arrivent sur notre planète. Je regrette que les américains n’en aient produit que trois types : les humanoïdes, le plus aboutis étant Klaatu, différencié des humains par sa taille, les atrophiés (tant le Predator que la charmante bête de Super 8, s’éloignant de l’icône des débuts, qui se retrouve in fine dans Paul, une critique du genre) ou les choses autres (celui de 2001, l’odyssée de l’espace). Ceux qu’ils ont produit jusqu’à présent le plus sont les atrophiés… qui finalement deviennent des extraterrestres normaux, sans imagination.

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L’extraterrestre en 3D sans la texture définitive, Super 8

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Le predator avec ses dreads, Predator

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Paul, l’extraterrestre iconique par excellence, Paul

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Klaatu, devant son robot, l’extraterrestre le plus proche de l’humain, le jour où la terre s’arrêta

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Le monolithe, extraterrestre très différent de notre perception, 2001, l’odyssée de l’espace


L’image que j’ai choisi pour montrer cet être et le comparer aux autres n’est pas la plus évidente, car sans textures, ce n’est finalement qu’un masque, comme un personnage dans un scénario avant qu’il ne soit incarné par un acteur. Les points communs avec Paul sont la tête ovoïde et l’écrasement du nez. Il est intéressant de faire le parallèle entre ce nez absent et l’être humain, puisque c’est le nez, sur notre profil, qui permet de nous reconnaître (déjà les égyptiens l’avaient compris, et ne représentaient dans leurs peintures que des profils). Ainsi, cette absence de nez est synonyme d’absence de différenciation avec d’autres. Ensuite, le point commun partagé entre l’extraterrestre et le Predator est l’énorme bouche. Les deux crochets du Prédator ouvrent la peau de sa bouche en grand, laissant apparaître des dents acérées. Dans Super 8, la bouche s’ouvre en quatre, laissant là encore voir une mâchoire qui n’est pas très séduisante.

Il faut ici ouvrir une petite parenthèse. Aristote considérait le monstre comme quelque chose de non fini, d’imparfait. Les films de monstres (le loup garou par exemple) proposent une vision du corps de l’adolescent – qui peut aussi se transformer en corps de la mère, comme dans Braindead (Dead Alive, Peter Jackson, 1992). Ici, le jeune Joe va trouver l’extraterrestre enfouis dans un cimetière pour sauver la vie d’Alice, qui ne le laisse pas indifférent. Cimetière ou est enterrée sa mère, morte quelque mois auparavant. Étant donné qu’il fini par lui faire face, on peut voir en cet extraterrestre une représentation symbolique de la mère de Joe (qui apparait à la caméra après qu’il ait maquillé celle qui va devenir son amie, Alice, et qui disparait une fois que le vaisseau a récupéré le collier qu’elle lui avait laissé).
  
Revenons-en à la bouche de cet être. Dans le film, nous la voyons rarement fermée, toujours légèrement ouverte, montrant ses crocs aiguisés. Il peut à présent être rapproché avec d’autres lèvres, celles du vagin (et les crocs supposent que retourner dans le ventre de cette maman n’est pas garantis sans risques.

Seulement, pour la vision d’une mère, elle n’a rien de sympathique dans le visage. Certes, elle est morte, et il vaut mieux qu’elle arrête de tourmenter son fils (qu’elle quitte ce monde pour un autre, littéralement), mais il n’y a entre eux aucune ancienne complicité qui se fait jour. Je pense que cette bête n’aurait pas du être affreuse mais fascinante (ce qui aurait justifié d’autant plus que les militaires la conservent). Cela aurait permis de justifier plus que Joe, le jeune garçon, lui tienne tête. Par là même, son discours aurait obligatoirement été plus profond (même si juste les mêmes paroles avaient été prononcées). Et la fin du film aurait pu être d’autant plus belle.

Pour finir, voici le trailer :



[1] Si vous souhaitez trouver l’analyse de ce discours, je vous conseille le site ‘l’empire du spectacle’, à la page : http://0z.fr/I4VDR